Coup de blues

Bonjour. C’est moi, le panneau « Interdiction de s’arrêter » qui se trouve près de Cheval-Blanc. Je suis là depuis pas mal de temps déjà, mais je suis pas très sociable, alors je reste accroché là-haut et je regarde les gens qui passent. Vous m’avez certainement déjà vu. En tout cas, moi, je vois plein de monde.

Quand on m’a dit que je bosserais en Vieille Ville juste à côté de l’école du Château, j’étais ravi. Lorsque j’ai commencé, j’ai vu tous ces enfants qui allaient à l’école. Je les écoutais raconter leurs histoires de gosses. C’était chouette, une belle situation, je me suis dit. Et puis j’avais mes amis bleus. Non, pas les Schtroumpfs ! Les policiers. Ils m’aidaient dans mon travail. Ensemble, nous chassions les voitures qui voulaient s’arrêter sur le trottoir. Grâce à nous, les enfants qui souhaitaient traverser la route pour se rendre à l’école pouvaient voir les voitures arriver, en toute sécurité.

Mais voilà, maintenant que de nombreuses années se sont écoulées, je me sens las. Parce que j’ai bien vite déchanté. J’avais pas compris que les policiers, c’était pas comme les Schtroumpfs. Ils sont pas une centaine et ils ont d’autres choses à faire. J’ai rapidement remarqué que, sans eux, les voitures s’arrêtaient sur le trottoir.

Les premières fois, j’ai tenté d’expliquer le problème à ces gens qui veulent que leur enfant soit déposé le plus près de l’école. Je leur ai dit que cela compliquait la circulation et que la sécurité de leur enfant n’était pas garantie. Mais ils ne m’écoutaient pas. Alors j’ai crié, j’ai gueulé. Mais rien. Je crois qu’avec ma bouche barrée par cette croix, on ne m’entendait pas.

Sans la police, je ne sers à rien.

Peut-être qu’avec ces quelques lignes je toucherai certains parents qui se diront que leur enfant peut bien faire quelques pas de plus sans se fatiguer. Que de laisser le passage piéton et le trottoir tranquilles, ce sont les enfants qu’ils laissent tranquilles. Que de profiter de l’absence de la police pour faire une bêtise, ce n’est plus de leur âge. Ils réfléchiront au fait que ceux qui m’ont installé sur ce mur ne l’ont pas fait au hasard, sans réfléchir.

Il y a mon copain près de la fontaine, le Sauvage, qui m’a dit qu’il pouvait essayer de faire la loi avec son gourdin. Je lui ai dit que c’était pas la solution. Les gens peuvent réfléchir, non ? Non ?... Non.

Le panneau de la rue de la Constituante

(propos recueillis par Colin)
septembre 2020

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