Racisme. Un match de football historique ? Pas certain !

Le match

8 décembre 2020, le match de football de Ligue des champions qui oppose le Paris-Saint-Germain à Istanbul Basaksehir est arrêté au bout d’un quart d’heure. Les joueurs quittent le terrain et n’y reviendront que le lendemain. Pourquoi ? Parce que beaucoup d’entre eux estiment qu’un des arbitres a tenu des propos racistes.

Les réactions des médias

Mbappé et Neymar, superstars largement suivies sur les réseaux sociaux, postent des messages engagés. Les médias s’empressent de faire les gros titres. Des journaux aux chaînes de télévision, c’est le même discours : « Bravo aux joueurs qui n’ont pas accepté les propos racistes de l’arbitre ! Ce match fera date dans l’histoire du football. » Les mots varient, le sens est le même.

Que savent-ils ?

Quasiment tous les journalistes et consultants qui réagissent quelques minutes après l’interruption du match le font sans vraiment savoir ce qui s’est dit, sans savoir du tout pour la plupart. Mais ils sont tous fiers de prendre la parole pour condamner ces propos racistes.

Racisme, vraiment ?

Ce 8 décembre, je regarde le match en direct à la télévision, sans commentateur. J’entends donc assez bien ce qui se dit sur le terrain. L’un des arbitres vient de dire « le noir » pour désigner un membre de l’équipe turque. Il l’a dit en roumain « negru », les quatre arbitres sont roumains. Les choses dégénèrent, car sur le banc, il y a un francophone qui a entendu « negro » à la place de « negru ». Très vite, on entend clairement que l’arbitre s’explique calmement en disant qu’il n’a pas dit « negro », mais bien « negru ». Il précise qu’en roumain, ça veut dire « noir ». Ma réaction est simple. Je comprends ce qu’a voulu dire l’arbitre et je ne vois rien de choquant. J’ai moi-même déjà dit « le noir » pour désigner un de mes juniors à une personne qui me demandait qui était Gaspard [nom d’emprunt] sur le terrain, puisqu’ils avaient tous le même maillot. Il n’y a qu’un noir dans mon équipe. Il aurait été roux que j’aurais dit « le roux », grand c’aurait été « le grand ». Suis-je raciste ? On ne me l’a jamais reproché. Mais quelques heures après ce match de Ligue des champions, je suis atterré par les réactions qui fusent et qui attaquent l’arbitre. Pas de questionnement, pas d’analyse, juste des mots qui font le buzz. De la haine également. C’est la société actuelle.

Ensuite ?

Très marqué par cet événement, j’ai plusieurs fois consulté les médias pour suivre l’évolution de cette histoire. Le résultat est affligeant. Quasiment tous les journalistes ont très vite oublié l’affaire qu’ils avaient pourtant qualifiée d’historique dès le lendemain des faits. Ils ont oublié l’arbitre qui a vu sa vie basculer. Ils ont fait le buzz et puis ils s’en fichent royalement ! Pourquoi ? Parce que cette histoire demande un minimum de réflexion, de débat et d’intelligence pour faire avancer le combat contre le racisme. Trois éléments qui ne sont plus beaucoup employés dans notre société.

Neuf mois plus tard...

La semaine passée, je suis retourné sur internet chercher des infos sur la décision ou non d’un verdict de l’UEFA, instance du football chargée de juger le comportement de l’arbitre. J’y ai trouvé un document de 22 pages en anglais très intéressant, très détaillé. On y retrouve notamment tout ce qui a été dit sur le terrain. Au final, l’UEFA a admis que l’arbitre n’a pas tenu de propos racistes et qu’il est resté calme malgré le staff turc très agité. Donc pas de sanctions, affaire classée ? Et non, il a été suspendu six mois et obligé à suivre un programme éducatif parce qu’il a utilisé un mot mal compris par son contradicteur ! L’UEFA le pointe comme coupable et valide donc ainsi tous les propos haineux déversés sur lui, seul contre tous.

Notez que « le noir » qui s’en est pris à l’arbitre et qui a déclenché la vague qui a déferlé sur l’arbitre a écopé... d’un match de suspension. Quant à une partie du staff turc qui a traité les arbitres de « gitans » et lancé « Ce n’est pas la Roumanie ici ! » le jour du match, et bien personne n’en parle.

Noirs, femmes, étrangers, opprimés, ils ne sont pas prêts de vivre dans un monde intelligent où nuances et mesures rythmeraient le cours de la pensée humaine. Échanger, discuter, comprendre et trouver une solution paisiblement. Pourquoi est-ce si difficile pour tant de gens.

Colin
septembre 2021

 

Lien vers le document de la FIFA

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